Monsieur le Premier ministre, depuis la fermeture du centre humanitaire provisoire de Paris, les demandeurs d’asile et migrants ne sont plus accueillis et orientés au fur et à mesure de leur arrivée dans la capitale. Dans le nord-est de Paris, et notamment près du centre commercial du Millénaire, se sont reconstitués des campements de masse indignes de notre République : indignes pour ceux qui y vivent, indignes pour les riverains, indignes de la sixième puissance économique au monde.
Le système mis en place par l’État pour prendre le relais n’est pas suffisant sur le plan quantitatif. Sur le plan qualitatif, ce système exclut la moitié des migrants – ceux dont les empreintes ont été enregistrées dans un autre État de l’Union –, mais ne propose aucune alternative. Comment dès lors s’étonner que les campements grossissent ?
En outre, les ONG demandent à être assistées par la police, qui actuellement refuse de collaborer. Or sans la présence d’ONG et de policiers, un campement de 1 500 personnes devient tout simplement une zone de non-droit. Deux migrants ont été récemment retrouvés noyés, ce qui était craint à juste titre. La ville de Paris alerte depuis des semaines sur l’urgence à agir ; elle a pris des mesures indispensables de salubrité, mais est arrivée aux limites de ce qu’une ville peut faire.
C’est l’État, c’est le ministère de l’intérieur qui est compétent en matière de demande d’asile et d’hébergement d’urgence des personnes sans abri. Seule l’organisation de l’accueil au fur et à mesure des arrivées, avec un diagnostic et une orientation, est de nature à mettre fin à ce chaos. Enfin, vous devez proposer à ces personnes vulnérables une solution avant l’évacuation.
Monsieur le Premier ministre, comment le Gouvernement compte-t-il sortir de cette crise et garantir l’ordre public dans les quartiers concernés par ces campements de masse, qui n’en peuvent plus ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur. Madame la députée, l’objectif de l’État à Paris est clair : d’une part, une opération d’évacuation des campements est en cours de préparation ; d’autre part, nous voulons éviter la reconstitution de ces campements qui, comme vous l’avez souligné, sont indignes pour les personnes et occasionnent parfois des troubles à l’ordre public. Nous espérons, à cet égard, pouvoir compter sur le soutien de la mairie de Paris. On a pu le constater par le passé : la politique consistant à héberger tout le monde sans examiner les situations ne conduit qu’à la répétition des opérations de mise à l’abri, puis d’évacuation, sans fin. Il faut absolument que s’applique le droit.
En outre, dans cet accueil, chacun doit prendre ses responsabilités. Aujourd’hui, 95 % des migrants qui arrivent à Paris sont hébergés en dehors de la capitale : soit en banlieue, soit en province. Pour éviter cela, il faut lier situation administrative des migrants et hébergement plutôt que de continuer à mener une politique d’hébergement indifférenciée des personnes arrivant sur le territoire français. C’est le sens des dispositifs que nous avons mis en place : quatre structures d’accueil de jour sont désormais ouvertes, les centres d’accueil et d’examen des situations – CAES – parisiens comptent aujourd’hui 700 places permettant de garantir l’hébergement de 500 nouvelles personnes par semaine. Il faut éviter toute naïveté : les campements parisiens se composent aujourd’hui en très large partie de personnes qui refusent les mises à l’abri parce qu’elles veulent se soustraire à l’examen des situations administratives ; on note aussi la présence de filières. Face à ces situations, la seule solution est l’application du droit, et avant tout du droit de séjour.