Le Parlement a adopté définitivement le jeudi 29 mars, par un vote conforme de l’Assemblée nationale, la proposition de loi centriste tendant à renforcer l’encadrement des écoles libres hors contrat, soutenue par le gouvernement comme un outil contre « l’embrigadement » islamiste.
Le texte, issu du Sénat, a été voté à mains levées dans les mêmes termes qu’à la chambre haute fin février, au terme de vifs débats.
Aujourd’hui, l’enseignement privé est organisé selon deux modalités : certains établissements signent un contrat avec l’État, qui prend alors en charge certaines dépenses, en particulier de personnel. D’autres établissements, moins nombreux mais dont les effectifs progressent, sont dits « hors contrat » ; ils ne bénéficient pas d’aides de l’État et relèvent d’un régime moins contrôlé. Dans ces établissements, les libertés pédagogiques, intellectuelles, religieuses et philosophiques sont fortes et revendiquées.
Le rythme d’ouverture d’établissements hors contrat, de l’ordre de quelques dizaines par an, est en forte augmentation, le nombre est ainsi passé de 803 en 2010 à 1 300 en 2017, soit une croissance de plus de 60 %.
Cette proposition de loi part d’un constat que nous partageons : face aux phénomènes de radicalisation religieuse, de sectarisme, d’amateurisme, voire d’insuffisance pédagogique, les dispositions applicables à l’ouverture de ces écoles privées hors contrat sont obsolètes et inadéquates.
Le texte prévoit notamment un dispositif de déclaration unifié pour ouvrir un tel établissement, allonge le délai pour s’opposer à une ouverture avec une liste des motifs étoffée. Les sanctions sont alourdies si un établissement brave une opposition.
Le ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, a vanté jusqu’au bout « l’esprit d’équilibre » entre liberté d’enseignement et « protection de notre jeunesse ». Avec cette loi, « nous visons des phénomènes de société qui sont dangereux pour notre pays, dangereux pour notre jeunesse », a-t-il ajouté après le vote.
En commission des affaires culturelles et de l’éducation, nous avons défendu plusieurs amendements visant à passer d’un régime déclaratif à un régime d’autorisation. Nous avons d’ailleurs un doute quant à la possibilité laissée par le texte à des personnes fichées S d’exercer des fonctions dans ces établissements.
En effet, cette proposition ne semble pas être tout à fait à la hauteur de l’urgence de la situation. Elle ne sera pas, nous le pensons, de nature à enrayer les phénomènes de radicalisation que nous constatons, non seulement dans certaines écoles hors contrat, mais aussi dans les situations, de plus en plus nombreuses, de scolarisation à la maison. L’augmentation de ce phénomène révèle la tendance de ces familles à s’exclure du système pour revendiquer une différence et défier l’institution et ce qu’elle représente : la séparation entre la sphère privée et la sphère publique dans un esprit de laïcité, qui garantit la possibilité de parler des religions dans un esprit d’ouverture apaisé.
Le seul amendement adopté, gouvernemental, a permis de revenir au texte du Sénat, en écartant une disposition adoptée en commission pour empêcher une personne inscrite au fichier des personnes recherchées de diriger un établissement hors contrat. Les autorités administratives pourront recourir au motif d’ordre public dans un tel cas, a notamment assuré le ministre.
Pour le socialiste François Pupponi, élu du Val d’Oise, ce texte, certes imparfait, va dans le bon sens. Nous avons fait beaucoup de propositions. Nous l’avons voté compte tenu de ses avancées, en proposant de poursuivre dans un groupe d’études ce travail important, que nous devons mener tous ensemble.