Il y a 25 ans disparaissait Pierre Bérégovoy, figure majeure de la gauche durant les années Mitterrand dans des circonstances dramatiques puisqu’il semble s’être donné la mort, suite à la défaite de la gauche aux élections législatives dont il se sentait responsable en tant que dernier chef du gouvernement.
A l’occasion de ses obsèques, le Président de la République François Mitterand, très ému, dénoncera ceux qui avaient « jeté son honneur aux chiens », en référence aux articles de presse qui l’avaient attaqué pour un prêt contracté auprès d’un ami afin d’acheter son appartement.
Pierre Bérégovoy était né le 23 décembre 1925. Fils d’une famille modeste d’origine juive ukrainienne, il travaille comme ouvrier ajusteur-fraiseur à l’âge de seize ans, obtient différents diplômes dans le domaine de l’industrie et un concours lui permettant d’entrer à la SNCF, avant de rejoindre la Résistance en 1943. En 1949, au sortir de la guerre, il travaille au cabinet du ministre des Transports du gouvernement Henri Queuille. L’année suivante, il intègre l’entreprise Gaz de France à Rouen, et est muté à Paris en 1957. Sa carrière au sein de cette entreprise se termine en 1978 au poste de directeur adjoint.
Concernant la politique, il est proche de Pierre Mendès-France dans les années 1960. Dans la deuxième partie du XXème siècle, il sera de tous les combats de la gauche, de sa reconstruction avec l’avènement de la Vème République à l’accession au pouvoir de François Mitterrand en 1981, en passant par l’actualisation du “Programme Commun” en 1977. A partir de 1973, il fut maire de Nevers, dans la Nièvre, et député de ce même département de 1986 jusqu’à sa mort.
Une fois la gauche aux affaires, il devient secrétaire général de l’Elysée jusqu’en juin 1982. Ensuite, il occupera des fonctions ministérielles majeures. La première sera celle de ministre des Affaires sociales où il s’attellera à redresser l’Assurance Maladie, tout en gardant ses principes d’homme de gauche. Il sera par la suite nommé Ministre de l’Economie et des Finances sous les gouvernements Fabius, Rocard et Cresson.
Son action aura été caractérisée par sa continuité, et ce malgré une période de cohabitation. À Bercy, il laissera l’image de l’homme du Franc fort, refusant de dévaluer et s’attelant à maintenir les prix et la monnaie stables, ce qui permettra à la gauche de regagner la confiance des investisseurs.
L’apogée de sa carrière politique sera sa nomination en tant que chef du gouvernement en avril 1992, après y avoir été pressenti à maintes reprises. Premier ministre, il se fixe deux objectifs majeurs : combattre la corruption et résorber le chômage. Ses actions ne seront pas reconnues à leur juste valeur, car les attentes des Français sont trop nombreuses pour un seul homme. Il quittera Matignon suite à la déroute du Parti Socialiste aux élections législatives de mars 1993.
Pierre Bérogovoy était avant tout un symbole de la gauche. Homme venant d’un milieu modeste, ancien ouvrier, il est un exemple parfait de ce que la méritocratie républicaine peut permettre. Par son courage, son travail et ses convictions, il arrivera à gravir l’échelle sociale, aussi bien dans sa vie professionnelle que politique. Pierre Bérégovoy était un homme honnête et droit, un homme d’Etat, tué tant par la calomnie que par la balle.
Aujourd’hui, vingt-cinq ans après sa mort, nous nous devons d’honorer sa mémoire. Celle d’un homme de gauche tout d’abord, mais aussi celle d’un homme intègre, courageux, dévoué à son pays, lui, l’ouvrier ajusteur-fraiseur qui a poursuivi sa route jusqu’au parvis de l’Hôtel de Matignon pour bâtir l’avenir de la France.