Monsieur le Président
Monsieur le Ministre,
Mes chers collègues
Le projet de loi de finances pour 2018 présente une augmentation du Budget de l’ Education Nationale de 1,3 milliard d’euros par rapport à 2017. Notre groupe a bien compris qu’il est bâti sous le schéma dominant d’une école efficace qui veut que chaque élève à la fin du primaire sache lire, écrire et compter.
Qui pourrait être contre cet objectif ?
La question qui se pose est comment s’assurer d’atteindre cet objectif. Une école efficace est-elle toujours une école juste ? Le problème essentiel est- il de faire mieux réussir les meilleurs ou d’aider à combler les inégalités dont le système éducatif français est champion.
L’orientation qui consiste à relancer des classes de latinistes ou d’hellénistes pour quelques-uns, de préférer les classes bilingues pour certains à un apprentissage plus précoce d’une seconde langue, de multiplier les postes à profil, de confier l’évaluation des enseignants aux responsables d’établissement, nous interpelle : l’efficacité scolaire est elle toujours garante de l’équité, l’école efficace est-elle celle du bien être, et du développement de l’autonomie des élèves ?
Le plan « 100% de réussite au CP », avec le choix des CP dédoublés dans les REP, ne suscite pas grande opposition car il participe d’un choix raisonné pour les élèves et les secteurs défavorisés. Toutefois, Monsieur le Ministre, vous qui êtes un expert, vous oubliez de préciser que dans l’histoire de l’Education nationale les classes à 12 élèves ont existé – c’est ce qu’on appelait classes de perfectionnement, avec des maîtres spécialisés pour les enfants en difficulté – et elles avaient déjà démontré que la seuls diminution d’effectifs n’était pas en soi une réponse suffisante pour remédier efficacement aux difficultés des élèves et que comptent aussi pour la réussite, les méthodes et le choix des enseignants. Elle ne nous dispense pas de réfléchir sur la formation des enseignants que certains de vos prédécesseurs avaient supprimée, le manque de locaux suffisants pour diviser les classes par deux, et de personnels à mettre face aux élèves, surtout si on dédouble aussi les CE1 ;
Nous avons déjà souligné, que, ce faisant, vous asséchez le dispositif plus de maitres que de classes, plébiscité par les équipes,
Enfin, la récente décision de reporter la revalorisation des salaires des enseignants, décidée par le quinquennat précédent longuement concertée, nous surprend.
Surtout, et là encore nous l’avons déjà souligné, la mesure sur le libre choix laissé au acteurs de conserver la semaine de quatre jours et demie ou de revenir aux quatre jours ne nous semble pas aller dans le sens de l’intérêt des enfants; Toutes les études avaient souligné combien la concentration des apprentissages sur quatre jours était néfaste pour les enfants, en sorte qu’une matinée scolaire de plus était positive. Par ailleurs les plus défavorisés étaient aussi ceux qui avaient des activités périscolaires les plus étiques. Certes, cette réforme demandait des efforts aux adultes dans l’intérêt des enfants. L’OCDE elle-même avait noté qu’avec la réforme des rythmes éducatifs, nous allions dans le bon sens. Nous marquons ici un point d’arrêt sinon un début de retour en arrière qui ne manque pas de nous alerter ,pour l’avenir de nos jeunes.
Cette diminution d’une matinée ne nous semble pas contrebalancée par une augmentation suffisante dans le budget des mesures d’accompagnement. Le montant des AE prévues pour les actions éducatives complémentaires aux enseignements et la vie scolaire serait plutôt de nature à nous inquiéter. Si dans le secondaire, une mesure comme devoirs faits nous semble juste, et conforme aux réformes initiées auparavant sur le collège, en revanche les budgets nécessaires pour un accompagnement efficace ne nous sont pas au rendez-vous.
Quant au numérique, indispensable pour que notre système éducatif se mette résolument à l’heure du 21e siècle, nous ne voyons plus nettement ce qui lui est réservé dans les PIA. Et surtout les budgets consacrés à la réussite éducative dans le budget sur la cohésion sociale sont en stagnation.
Il existe aussi une grande oubliée du PLF : la médecine scolaire. Certes depuis longtemps, l’’Education nationale fait face à une situation de « crise sanitaire » qu’elle peine à résoudre, et ce n’est pas seulement une question de crédits. L’âge moyen des médecins de l’Educations nationale est de 54 ans, et près d’un tiers des effectifs partira à la retraite sous cinq ans. 90% des médecins de l’Education nationale sont des femmes. Le taux d’encadrement se situe en moyenne à l’échelon nationale à 12.000 élèves par médecin – pouvant aller jusqu’à 46.000 dans certains départements. Ces taux continuent de s’aggraver chaque année.
Il s’agit d’un sujet préoccupant pour la déclinaison de la politique de santé à l’école. Si le recrutement de 400 postes a été budgeté sous le précédent quinquennat, ces postes ne sont pas pourvus. Il faut voir qu’au regard de leurs collègues exerçant dans les hôpitaux publics et surtout dans les PMI, les médecins scolaires gagnent en moyenne près de 1000 euros de moins par mois et entre 3000 et 7000 euros de prime de moins par an. En outre, les MEN n’ont toujours pas droit de prescrire à ce jour et, si cette possibilité devrait être autorisée prochainement, leurs prescriptions ne seront par remboursées par la CNAM et les CPAM.
Certains élèves sont diagnostiqués pour des troubles visuels et auditifs parfois seulement au collège, ce qui a un impact criant sur les apprentissages des enfants des familles les plus démunies qui ne font pas de suivi en médecine libérale. Actuellement, les médecins scolaires sont surtout positionnés sur la prévention tertiaire, donc la prise en charge des décrocheurs, l’examen à la demande des élèves les plus bruyants, alors que la plus value des actions est dans la prévention primaire et la promotion de la santé.
Monsieur le Ministre, que comptez-vous faire pour permettre un recrutement suffisant de médecins à l’Education nationale, notamment en termes de revalorisation indemnitaire, statutaire, et prise en charge des frais .
Enfin, suite à l’intéressant rapport de Mme Lang, sur la scolarisation des enfants allophones, l’école de la république se doit d’être en première ligne , comme dans le suivi des décrocheurs, ou la prévention de la radicalisation. Quels sont les mesures que vous comptez prendre pour ces actions ?
Pour toutes ces raisons, notre groupe demeurera très vigilant sur les améliorations qu’il convient d’apporter à ce programme qui n’est pas encore à la hauteur des enjeux cruciaux qui sont devant nous.