Les enjeux majeurs que constituent la lutte contre les inégalités et la fraude fiscale
J’ai rencontré lundi 2 juillet des représentants de l’ONG Oxfam qui a pour vocation de lutter contre les inégalités et la pauvreté à travers le monde. Leurs travaux sont nécessaires et utiles à notre société pour montrer et dénoncer les inégalités qui ne cessent de croitre et la grande pauvreté qui ne se résorbe pas. Oxfam a publié récemment un rapport pointant les inégalités au sein des entreprises du CAC40 s’intitulant « CAC 40 : des profits sans partage ». Ce rapport pointe la responsabilité des grandes entreprises françaises dans la création et l’alimentation des inégalités. Par exemple, les 10% des Français les plus riches détiennent plus de la moitié des richesses nationales alors que la moitié des Français les plus pauvres ne possèdent que 5% des richesses. L’entreprise, créatrice des richesses, est aussi le moteur de ses inégalités, au même titre que la fraude fiscale.
Oxfam ne se contente pas de dénoncer et demeure une source de propositions qu’il faut écouter et prendre en considération pour répondre aux problématiques alarmantes qui concernent la lutte contre les inégalités et la lutte contre la fraude fiscale. La lutte contre les inégalités passe avant tout pour eux par un meilleur partage des richesses créées, notamment en associant réellement les salariés à la gouvernance des entreprises. Cette association permettrait de renforcer le dialogue social, car aujourd’hui ce sont les représentants des actionnaires qui décident de la gestion des entreprises. Cela pose un double problème. Tout d’abord, l’argument de la prise de risque des actionnaires est souvent utilisé pour justifier une gouvernance des entreprises à laquelle ne sont pas ou trop peu associés les employés. Or, le salarié prend plus de risque que l’actionnaire, car son entreprise est souvent son seul employeur tandis que l’actionnaire dispose souvent d’un portefeuille d’actions diversifié. Aussi, les actionnaires ont trop souvent une vision à court-terme où la rentabilité immédiate prime sur une vision de long-terme. Les employés auraient, eu, intérêt à privilégier le temps long, ce qui serait bénéfique pour l’entreprise et donc l’économie française.
Une meilleure association des salariés permettrait aussi de favoriser le dialogue social, comme c’est le cas en Allemagne. La France est un des pays européens où les salariés sont le moins concernés et représentés dans la décision au sein des entreprises. Cela doit changer, et il est nécessaire d’octroyer aux salariés un rôle d’action et de décision partagée avec les actionnaires plutôt que leur rôle actuel de consultation qui, in fine, a relativement peu de poids. Aussi, pour assurer une lutte plus efficace contre les inégalités, le gouvernement devrait inclure dans sa loi Pacte une mesure stipulant que les entreprises doivent déclarer la répartition salariale au sein de l’entreprise, comprenant le salaire moyen, le salaire médian, et la répartition des salaires par quartile. Cela donnerait une meilleure visibilité sur les différences salariales et permettraient d’associer les entreprises à la lutte contre les inégalités. L’entreprise n’est-elle qu’une machine à profit ou doit-elle prendre un rôle actif dans la société, notamment dans les domaines sociaux et environnementaux ?
Aussi, la lutte contre la fraude fiscale est un enjeu majeur pour notre pays, ce qu’Oxfam a bien compris. Sous le quinquennat de François Hollande, cet enjeu avait été saisi et traité. Ce travail indispensable doit continuer, et deux mesures majeures peuvent y contribuer. La première et la principale serait de faire sauter le verrou de Bercy, qui stipule que les services du Ministère de l’Economie et des Finances sont seul à décider de poursuivre les fraudeurs fiscaux. Or, cette initiative devrait revenir à la justice, car la fraude fiscale est un délit majeur qui témoigne d’une absence de considération à l’égard de la France et de ses concitoyens. La seconde mesure serait de pouvoir sanctionner les pays qui facilitent l’évasion fiscale. Cette action pourrait prendre plusieurs formes et doit être affutée, mais l’idée semble nécessaire dans un objectif d’équité fiscale et de collaboration entre les pays.